Les virus végétaux sont responsables chaque année de pertes de récoltes importantes dans le monde. Des méthodes de protection reposant sur les mécanismes biologiques de l'infection par les virus sont activement recherchées pour sécuriser les récoltes. Des plantes transgéniques rendues résistantes à ces virus, sont une des voies explorées par le Pr. Ervin Balázs, chercheur hongrois de Gödöllö, spécialiste de l'étude de ces plantes transgéniques. Il vient de conclure un séjour d'un an à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), sur le site de Versailles, dans l'équipe de Mark Tepfer, qui travaille sur cette même thématique.
Le séminaire de clôture
de cette chaire, s'est tenu le 26 Septembre 2003. Il a permis
de faire le point des questions que soulèvent les plantes
transgéniques résistantes au virus de la mosaïque
du Concombre (CMV), qui attaque de nombreuses espèces de
plantes cultivées. La conclusion de ces travaux coïncidera
avec le 8ème symposium international de bio sécurité
des OGM qui se tiendra à Montpellier en Septembre 2004.
Les chercheurs devraient alors disposer d'éléments
solides pour dire si ces plantes peuvent être cultivées
sans entraîner l'émergence de nouveaux virus, ni
accélérer leur évolution.
La résistance au virus est obtenue en transférant
dans le génome de la plante un fragment de l'information
génétique du virus. La présence de ce transgène
empêche alors la multiplication du virus dans les cellules
de la plante. L'équipe de Mark Tepfer a montré au
laboratoire, sur le cas des plantes transgéniques résistantes
au CMV, qu'un virus infectant la plante peut se recombiner avec
le transgène. Cette recombinaison, c'est à dire
l'incorporation dans le génome du virus de l'information
génétique du transgène, pourrait se traduire
par l'émergence d'un virus ayant des propriétés
nouvelles, ce que ces travaux cherchent à évaluer.
Pour évaluer l'impact réel de ce phénomène,
il faut le comparer à ce qui se passe en l'absence de plantes
transgéniques. En effet, les plantes cultivées sont
généralement infectées par différents
virus qui se recombinent entre eux au sein de la plante. La comparaison
de la recombinaison dans les deux situations, menée dans
l'équipe de Mark Tepfer sur le cas du CMV, est un élément
essentiel de l'évaluation du risque réel. Elle doit
en effet permettre de déterminer si les virus créés
dans les plantes transgéniques sont différents de
ceux qui se créent dans les plantes cultivées classiques.
Parallèlement, les chercheurs étudient les propriétés
biologiques des virus recombinants créés dans les
plantes transgéniques. Ces travaux sont menés sur
le cas du CMV par l'équipe de Mireille Jacquemond, au Centre
INRA d'Avignon, dans de strictes conditions de confinement. Certains
de ces virus sont tout simplement non infectieux. D'autres présentent
des propriétés proches des virus parentaux. La moitié
toutefois présente un ensemble de déficiences qui
fait que leur survie et leur dissémination en conditions
naturelles seraient très compromises.
Pour parvenir à la compréhension des propriétés
biologiques des virus recombinants, l'équipe d'Ervin Balázs
s'est intéressée aux interactions entre les protéines
codées par les génomes viraux recombinants. Cette
étude indique que la déficience de certains virus
recombinants serait due à un défaut dans l'interaction
entre deux protéines virales. Le rôle de la recombinaison
s'avère essentiel dans l'évolution des virus. Mais
est-elle susceptible d'accélérer l'évolution
des virus dans les plantes transgéniques ? Les travaux
menés par l'équipe de Fernando García-Arenal,
de ETSI Agronomos à Madrid, mettent en évidence
le paradoxe entre la relative facilité de détection
de virus recombinés en laboratoire, et leur extrême
rareté au champ.
Source : © Milfeuille Presse
Thomas Quéguiner