OGM - Vignes transgéniques : vers la reprise des essais en plein champ ?
17/10/2003 - 12h00 (FR)

 

Suspendu en 2001, le programme de recherches de l'INRA sur des porte-greffes résistants au court noué devrait être repris l'année prochaine. Sous réserve de l'autorisation des ministères compétents après avis de la commission du Génie biomoléculaire, des essais en plein champ sont prévus à Colmar. Cette expérimentation OGM n'est engagée par l'INRA que sur un aspect phytosanitaire.

Va-t-on revoir en Alsace des porte-greffes transgéniques en plein champ ? Après avoir suspendu son programmes de recherche sur des vignes résistantes au court noué en 2001, l'INRA en tout cas veut y croire. Il y a plus de deux ans, l'institut avait du renoncer à ses essais en plein champ dans cette région. Des essais contre lesquels des viticulteurs alsaciens avaient manifesté une opposition très vive.
Cela fait plusieurs années que l'INRA travaille sur des porte-greffes résistants au court noué, cette dégénérescence infectieuse de la vigne, transmise par un ver (le nématode) vivant dans le sol et contre laquelle selon l'INRA il n'existe aucun traitement phytosanitaire efficace. Des expérimentations en plein champ ont déjà été menées en Alsace et en Champagne, en collaboration avec Moët et Chandon. Mais le sujet est hautement sensible et suscite bien souvent des polémiques. Beaucoup de vignerons sont en effet hostiles à l'idée de la transgénèse : attachés à la tradition et au passé culturel de la viticulture française, ils estiment que l'introduction des OGM dans les vignobles nuirait à l'image du vin auprès des consommateurs.
. L'INRA est bien consciente du problème : "la vigne étant une culture sensible tant du point de vue symbolique qu'économique, et constituant un élément important de notre mode de vie, l'opinion publique actuelle semble être défavorable à la commercialisation des produits transgéniques", peut-on lire dans une déclaration de la direction générale de l'INRA. Mais l'institut souligne également que l'absence de traitements efficaces contre plusieurs maladies de la vigne menace la production nationale.
Dans les pays du Nouveau Monde, notamment en Australie ou aux Etats-Unis, on mène des recherches poussées en matière de vignes transgéniques. En Europe, des essais ont été menés en Allemagne et en Italie. Faudra-t-il à l'avenir en France s'en remettre à des plants étrangers, comme au temps du phylloxera, parce que l'on aura pas développé une parade efficace contre le court noué ?
Pour la reprise de ses essais en plein champ, l'INRA n'a rien voulu laisser au hasard et a multiplié les précautions et les concertations. La décision a été prise après consultation d'un groupe de travail composé de chercheurs, professionnels de la vigne et de "simples" citoyens ( dont une exploitante agricole, un éducateur spécialisé etc.). Une démarche inédite pour un organisme de recherche. Se basant sur les recommandations du groupe de travail, l'INRA a ensuite pris plusieurs décisions.
L'INRA n'engagera des essais OGM vigne en champ que sur l'aspect phytosanitaire. Vu le contexte sensible, l'institut ne décidera pas de développer une innovation OGM "avant d'être clairement mandaté pour cela par la profession". L'essai en plein champ sur la résistance au court noué par la vigne OGM à Colmar durera 5 ans, sous réserve d'autorisation par les ministères compétents après avis de la commission du génie biomoléculaire : "actuellement le dossier est prêt, la procédure est en cours, indique Pierre-Benoît Joly, chef de projet à l'INRA. L'objectif est de commencer l'essai en plein champ en janvier 2004".
Un essai qui a fait l'objet d'une communication locale préalable et dont le protocole est déterminé par les scientifiques puis discuté par un comité local de suivi. "Les précautions prises seront, au-delà des dispositions réglementaires, discutées et évaluées par le comité local de suivi", assure l'INRA. Les résultats scientifiques seront communiqués au comité local de suivi et le "suivi environnemental et de bio-vigilance sera rendu public". L'expérimentation se déroulera de 2004 à 2008 inclus. "Les plants seront ensuite détruits, conformément à la réglementation européenne", poursuit Pierre-Benoît Joly.
Reste la question des risques de dissémination dans l'environnement à partir de ces porte-greffes transgéniques. Ces risques seraient faibles, et en tout cas moins importants que ceux induits par l'utilisation de levures OGM dans le vin. Mais le problème de ces levures est encore une autre histoire...

Source : © Terre-Net Ligérienne de Presse