Au cours de cet été, en moins de deux mois, 24 essais au champ de nouvelles variétés végétales, dont 19 essais de plantes transgéniques, ont été détruits, soit près de la moitié des essais de plantes génétiquement modifiées mis en place en France en 2003. Ces saccages répétés sans précédent dans le monde- portent un grave préjudice aux activités de recherche et de développement en biologie végétale, secteur pour lequel la France se place encore parmi les meilleurs au plan international.
Ces essais en plein champ, conduits par des chercheurs du secteur
public et du secteur privé, permettent de valider des années
de travaux menés en laboratoire et en serre. Ils ont reçu
toutes les autorisations nécessaires, et sont réalisés
dans des conditions qui ne font courir aucun risque ni à
l'homme ni à l'environnement, sous contrôle de l'autorité
de l'Etat. Certains ont pour objectif d'étudier la physiologie
et le métabolisme des plantes. D'autres ont pour objectif
de mener les évaluations nécessaires au développement
de variétés génétiquement modifiées
présentant de nouveaux caractères agronomiques,
technologiques ou thérapeutiques. Pour toutes ces études,
la transgénèse est devenue un outil indispensable.
Demain, toutes les variétés commercialisées
ne seront pas génétiquement modifiées, mais
la plupart auront été mises au point grâce
aux connaissances liées aux biotechnologies végétales.
Dans le monde, plusieurs milliers d'essais au champ de plantes
transgéniques sont initiés chaque année par
les entreprises et les universités dans la plus grande
sérénité, en Amérique du Nord mais
aussi dans des pays comme l'Inde ou la Chine, en passe de devenir
des acteurs importants de la recherche végétale.
La France, producteur agricole mondial majeur, est en train de
perdre pied dans un domaine en évolution rapide, capital
pour sa compétitivité scientifique et économique.
L'amélioration des plantes via des techniques diversifiées,
dont celles mettant en jeu des OGM, est en effet indispensable
pour permettre à l'agriculture d'intégrer les nouvelles
exigences du développement durable, promouvoir un meilleur
respect de l'environnement et garantir aux consommateurs une offre
alimentaire européenne de qualité.
Avec ces destructions, il n'est plus possible de mener en France
un programme d'amélioration des plantes utilisant des technologies
de pointe. Le processus de recherche et d'innovation est progressivement
bloqué. Aujourd'hui, nous risquons de perdre nos entreprises
et nos chercheurs les plus inventifs. Déjà les filières
de formation en biologie végétale sont désertées
par les étudiants. Nous risquons également de ne
disposer à l'avenir, pour notre agriculture, que de semences
obsolètes ou importées, ce qui compromettrait notre
indépendance et notre compétitivité en matière
agricole et alimentaire.
En tant que membres de la communauté scientifique, à
la fois chercheurs, enseignants et citoyens :
Nous avons de multiples responsabilités : évaluer
l'intérêt et l'innocuité des produits issus
de nos recherches, expliquer la progression de nos travaux, être
attentif aux besoins et aux attentes de la société.
Nous avons aussi la responsabilité de condamner ces actes
de destruction qui empêchent la progression du savoir et
occultent tout débat serein sur les plantes génétiquement
modifiées.
Nous souhaitons le développement d'un progrès maîtrisé
et partagé, seul à même de garantir la liberté
de choix à laquelle agriculteurs et consommateurs ont pleinement
droit.
Nous demandons au gouvernement de prendre les mesures nécessaires
pour permettre à la recherche végétale de
remplir normalement ses missions.