COMMUNIQUE DE PRESSE

du collectif d'agents de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur pour la grâce de Bové

Ce communiqué de presse a été lu en début du discours central de José Bové, fête du Larzac 2003 après le concert de Manu Chao et avant celui de Asian Dub sur la scène centrale, au court de la nuit du 2 au 3 août, face à 200 000 personnes!

 

700 agents de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur, en sciences du vivant et en sciences humaines, ont signé depuis le 22 juin un appel au Président de la République, pour la libération de José Bové.

Les médias mais aussi les ministères et institutions concernés se sont étonné : comment des scientifiques peuvent-ils prendre la défense de ceux qui mettent en cause leur activité ?
La destruction de plants OGM au CIRAD ou à l'INRA constitue en effet une première : la Recherche a été attaquée, interpellée, et finalement mise devant ses responsabilités par des utilisateurs potentiels de ses résultats.

Les scientifiques sont soumis à une double pression :
- interne et académique : augmenter les connaissances et ses produits ;
- industrielle et financière : augmenter les découvertes valorisables commercialement.
Du coup ils en arrivent à oublier la finalité de la recherche publique, qui est d'améliorer la qualité de vie des citoyens et de la société. Les chercheurs évaluent ainsi leur travail et ses résultats uniquement entre eux, sans impliquer les citoyens.
Ce glissement est d'autant plus préoccupant que les salaires et le fonctionnement de la recherche publique sont financés

Les actions de J. Bové, contestables sous certains aspects, ne constituent pas une attaque contre la recherche fondamentale sur le génome ou contre la recherche en général.
Elles nous ont rappelé la nécessité ­ éthique ­ d'utiliser les utilisateurs potentiels de la recherche (agriculteurs, consommateurs, industriels, etc.) dans la définition et l'évaluation des programmes scientifiques. C'est en particulier parce qu'ils n'ont pas eu voix au chapitre des inventions les concernant directement que les agriculteurs s'en sont pris à la Science.

Mais pas d'ingénuité non plus de notre part : notre prise de position ne veut pas dire, en ce qui concerne par exemple la recherche agronomique, que les agronomes doivent être aux ordres des agriculteurs, des consommateurs, ou encore des firmes semencières ou agroalimentaires. Elle veut dire que la Recherche Publique ne doit pas rester un monde clos, fermé, qui décide en son sein et ne rend compte qu'à lui-même. Elle veut dire que celle-ci doit dialoguer avec la société civile, afin de définir ensemble les finalités qui déterminent les contenus des programme scientifiques, en prenant en compte :
- la pluralité des objectifs et des besoins des acteurs ;
- la diversité de leurs points de vue.

Encore merci à J Bové et à ses collègues d'avoir aidé le monde de la Recherche, et la société en général, à en re-prendre conscience ; ils ont ainsi re-affirmé la nécessité d'une recherche indépendante des intérêts privés et commerciaux, mais partenaire active et consciente des citoyens et institutions de ce monde.